Création de Pierre Pontvianne, chorégraphe
Pour Alvaro Dule, danseur du Ballet de l'Opéra de Lyon
Note d'intention
Espace, temps, mouvement
Avec Koha, ces fondamentaux se transforment d’emblée en sensation physique. L’interprète les habite avec nous. Son corps module, modèle, ajoute et retranche à l’air. Il nous renvoie à notre propre corps, notre propre position dans un espace-temps devenu palpable, commun, entièrement partagé avec lui. Formé par un long apprentissage, le corps de l’interprète est soudain un assemblage de formes et de lignes, un volume qui renvoie à la sculpture, qui se fige par instant dans l’écoulement fluide des enchainements, et présente des instantanés tendus, jamais statiques.
Attention captive du spectateur qui se focalise sur un détail posé là, apparu à la faveur du mouvement. Le spectateur que nous sommes devient observateur, regardeur, il se surprend à scruter et à sculpter du regard, il lit, relit et relie ce corps unique avec la moindre parcelle d’espace, proche ou lointain, ou même au-delà. La chorégraphie ouvre notre champ de vision, elle fait appel au paysage, et comme souvent dans le travail de Pierre Pontvianne, elle fait appel à l’horizon, une ligne jamais arrêtée, jamais dépassée.
En dessous de la ligne d’horizon, le sol, au-dessus, le ciel.
Le danseur porte l’horizon puis se pose dessus.
Seul représentant de cette fine couche de vie entre ciel et terre, tour à tour aérien, fluide puis terrestre, il semble prendre contact avec le sol pour saisir son épaisseur, son histoire, ce qu’il recèle : les couches du temps. Il semble creuser l’atmosphère et s’y faufiler pour infiltrer le présent. Dissémination du mouvement, distribué selon une logique interne inconnue, une structure sous-jacente, fuyante, qui s’échappe en s’affirmant et s’affirme en s’échappant.
La proposition elle-même résiste au cadre chronologique fermé du spectacle : l’interprète la commence bien en amont de notre arrivée la continue encore bien après notre départ. Le mouvement-objet se prolonge dans un mince filet d’espace-temps, au-dessus, au-dessous, au-delà de l’horizon : il fait le tour de la terre, et nous revient à travers le corps d’Alvaro. En s’appuyant sur la puissance d’un interprète singulier, Pierre Pontvianne fait fuser le temps.
Pierre Treille
Solo — création octobre 2021
Durée : 2h
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