Dans la série “Les Chemins des songwriters” qu’il anime pour l’Opéra Underground, Piers Faccini rappelle souvent que l’art de la chanson est un exercice d’équilibrisme entre la lamentation et la danse. Initiée très tôt au chant comme aux arts du cirque, Elsa Birgé a intégré intimement cette dimension funambule : sa voix claire et altière sait se faire grave sans peser, rayonnante sans minauder, gouailleuse sans surjouer. Avec elle, ses partenaires d’Odeia, Lucien Alfonso (violon), Karsten Hochapfel (violoncelle, guitare) et Pierre-Yves Le Jeune (contrebasse) balancent aussi entre lyrisme tendu et échappées rêveuses. Dans Il pleut, ces quatre arpenteurs amoureux, que l’amour rend diablement imaginatifs, trouvent un fil entre Scarlatti ou Dowland et un compositeur ami comme Jean-François Vrod, quand ils ne percent pas une ligne de cœur de l’Auvergne à la Grèce en passant par Naples. Saisissants de naturel, leurs prodiges rappellent que la première élégance des équilibristes est de marcher au-dessus des gouffres avec une légèreté de flâneurs : ils ont la grâce pour eux, et toute la beauté des vertiges est pour nous.