“Il n’est qu’une espèce valide de voyage, c’est la marche vers les hommes”, disait l’écrivain Paul Nizan. Cette vérité, Juan Carmona n’a jamais cessé de la traduire dans son art, depuis ce jour béni où, à l’âge de 10 ans, il s’est emparé d’une guitare et ne l’a plus lâchée. Pour ce gamin né à Lyon dans une famille fraîchement exilée d’Afrique du Nord, l’instrument est devenu comme une clé universelle : un outil pour se construire une identité et une langue à soi ; une baguette de sourcier pour retourner vers l’Andalousie de ses ancêtres – où, tout jeune homme, il part étudier auprès des plus grands maîtres du flamenco ; mais aussi une boussole pour s’ouvrir d’innombrables voies et rencontres, de ses frères gitans à Pat Metheny, de la famille Chemirani aux musiciens gnawa, de l’Ouzbékistan à l’Inde, des scènes du monde entier aux plateaux de cinéma…
En 2025, Juan Carmona fête ainsi 40 années d’expériences en tous sens, et fait halte dans la grande salle de l’Opéra pour un concert en deux temps qui fera date. Car après une relecture avec ses musiciens de ses plus grands titres, suivra l’exécution de sa flamboyante Sinfonia flamenca pour orchestre et groupe de flamenco : le grand-œuvre d’un autodidacte qui, des années durant, note par note, pupitre par pupitre, a fait transcrire sur partition le génie foisonnant de son inspiration. Un travail de longue haleine et au souffle brûlant, une histoire folle et belle qui trouvera sa pleine expression avec l’appui de l’Orchestre de l’Opéra et du brillant chef Miguel Pérez Iñesta : des alliés de choix pour interpréter dans sa juste démesure cette symphonie de l’oralité savante.